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POSSIBILITÉ D’UNE MATHÉMATIQUE PURE.


savoir s’il y a ou s’il n’y a pas vérité dans la détermination de l’objet. Or, la différence entre la vérité et le rêve n’est pas décidée par la propriété des représentations qui sont rapportées à des objets, puisque ces représentations sont les mêmes de part et d’autre, mais elle l’est par la liaison des représentations suivant les règles qui déterminent l’enchaînement des représentations dans la notion d’un objet, et en tant qu’elles peuvent coexister ou non dans une expérience. Et alors ce n’est pas la faute des phénomènes si notre connaissance prend l’apparence pour une vérité, c’est-à-dire si une intuition par laquelle un objet nous est donné est prise pour une notion de l’objet ou de l’existence de cet objet, existence que l’entendement ne peut que concevoir. Les sens nous représentent le cours des planètes comme s’il s’exécutait tantôt en avant, tantôt en arrière, en quoi il n’y a ni erreur ni vérité, parce que tant qu’on pense qu’il n’y a là qu’un phénomène, on ne juge pas du tout encore de la nature objective de leur mouvement. Mais parce qu’il peut facilement y avoir jugement faux, si l’entendement n’est pas sur ses gardes pour éviter de prendre pour objective cette espèce de représentation subjective, on dit alors : Les planètes semblent rétrograder. Mais l’apparence n’est pas imputable aux sens ; c’est l’affaire de l’entendement, qui seul a charge de porter un jugement objectif d’après le phénomène.

De cette manière, tout en ne faisant aucune attention à l’origine de nos représentations, et quoique nos