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1565. éloignés et déserts. Les paysans furent également victimes de cet acte d’injustice ; les nouveaux gentilshommes, naguères misérables, devenus tout à coup grands seigneurs, voulaient colorer leur bassesse à force de magnificence, et, pour subvenir à leurs dépenses, ils accablaient les laboureurs d’impôts et de travail. Dans peu de temps les villages furent ruinés, malheur de peu d’importance si on le compare à ceux dont il fut suivi : on s’aperçut bientôt que la Russie entière était une proie dévolue par Jean iv à ses satellites. Ils paraissaient toujours fondés en droit aux yeux des tribunaux et il n’existait contre eux ni lois, ni justice. Le légionnaire pouvait impunément opprimer, piller son voisin, et si celui-ci osait s’en plaindre, il s’en tenait offensé et l’imposait à une amende. Dans le nombre des crimes de cette époque désastreuse, les paisibles citoyens virent, avec effroi, s’introduire dans Moscou la coutume suivante. Un légionnaire faisait cacher son valet, muni de plusieurs effets, dans la maison d’un gentilhomme ou d’un marchand et publiait ensuite la fuite et le vol prétendu de ce domestique : il en appelait aux tribunaux, réclamait un officier de police, trouvait son fuyard, porteur des effets déclarés, et il exigeait du maître de la maison, entièrement innocent, cinq