Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome IX, 1825.djvu/119

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1566. lettre flatteuse qui l’appelait à Moscou, pour un conseil ecclésiastique, célébra l’office divin, donna la communion à tous ses frères, et quitta, en pleurant, sa solitude chérie, comme s’il eût prévu que son corps seul y retournerait un jour. À trois verstes de Novgorod, il fut accueilli par tous les habitans de cette ancienne capitale qui le comblèrent de félicitations, de présens, et le supplièrent d’intercéder pour eux auprès du tzar, car le bruit avait couru qu’il les menaçait de sa colère. Jean reçut Philippe avec des honneurs extraordinaires : il le fit dîner à sa table, et après un entretien rempli de bienveillance, il lui annonça qu’il le nommait chef de l’Église. Le pieux solitaire, saisi d’étonnement, fondit en larmes et refusa ce brillant fardeau, conjurant le souverain de ne pas confier un poids si énorme à une aussi faible barque ; le tzar fut inflexible. Alors Philippe donna son consentement sous une condition. Prince, lui dit-il, je me soumets à votre volonté ; mais calmez ma conscience par la suppression de l’opritchnina ! Qu’il n’y ait qu’une Russie ! car, selon les paroles du Très-Haut, tout empire divisé deviendra désert. Il m’est impossible de vous bénir sincèrement lorsque je vois la patrie en deuil. Jean avait de l’empire sur lui-même : il réprima à l’instant un