Page:Kardec - Le livre des esprits, 2è édition, 1860.djvu/37

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quer à nous, de se servir des formes longues et embarrassées du langage humain, et surtout de l’insuffisance et de l’imperfection de ce langage pour rendre toutes les idées ; c’est ce qu’ils disent eux-mêmes ; aussi est-il curieux de voir les moyens qu’ils emploient souvent pour atténuer cet inconvénient. Il en serait ainsi de nous si nous avions à nous exprimer dans une langue plus longue dans ses mots et dans ses tournures, et plus pauvre dans ses expressions, que celle dont nous faisons usage. C’est l’embarras qu’éprouve l’homme de génie s’impatientant de la lenteur de sa plume qui est toujours en arrière de sa pensée. On conçoit d’après cela que les Esprits attachent peu d’importance à la puérilité de l’orthographe, lorsqu’il s’agit surtout d’un enseignement grave et sérieux ; n’est-il pas déjà merveilleux d’ailleurs qu’ils s’expriment indifféremment dans toutes les langues et qu’ils les comprennent toutes ? Il ne faut pas en conclure de là pourtant que la correction conventionnelle du langage leur soit inconnue ; ils l’observent quand cela est nécessaire ; c’est ainsi, par exemple, que la poésie dictée par eux défierait souvent la critique du plus méticuleux puriste, et cela malgré l’ignorance du médium.

XV

Il y a ensuite des gens qui trouvent du danger partout, et à tout ce qu’ils ne connaissent pas ; aussi ne manquent-ils pas de tirer une conséquence défavorable de ce que certaines personnes, en s’adonnant à ces études, ont perdu la raison. Comment des hommes sensés peuvent-ils voir dans ce fait une objection sérieuse ? N’en est-il pas de même de toutes les préoccupations intellectuelles sur un cerveau faible ? Sait-on le nombre des fous et des maniaques produit par les études mathématiques, médicales, musicales, philosophiques et autres ? Faut-il pour cela bannir ces études ? Qu’est-ce que cela prouve ? Par les travaux corporels on s’estropie les bras et les jambes, qui sont les instruments de l’action matérielle ; par les travaux de l’intelligence on s’estropie le cerveau, qui est l’instrument de la pensée. Mais si l’instrument est brisé, l’esprit ne l’est pas pour cela : il est intact ; et lorsqu’il est dégagé de la matière, il