son retour de captivité, n’avait pour tout bien qu’un cœur
aimant et un physique agréable. Il n’en est pas moins
facile à deviner que la jeune femme envoya sa démission
au vieux général et préféra suivre Maurice Dupin en France.
Cette liaison devint plus sérieuse que ne l’aurait pu faire
supposer la facilité de son début, et qu’elle ne parut d’abord
à Mme Dupin qui était au courant de toutes les aventures
de son fils ; elle élevait même un enfant, fruit d’une
des anciennes liaisons passagères du jeune Dupin, ce frère
naturel de George Sand, Hippolyte Châtiron, avec qui notre
héroïne fut toujours si liée. Lorsque Sophie Delaborde fut
enceinte, Maurice Dupin résolut de l’épouser. Mme Dupin
fut naturellement effrayée en apprenant cette résolution de
son fils et mit en œuvre tous les moyens, légitimes ou non,
pour empêcher ce mariage. Le passé de Sophie Delaborde
(George Sand a essayé de le gazer, mais elle aurait peut-être
mieux fait de ne pas en parler du tout) était plus que
douteux, et d’ailleurs, ce n’était guère une compagne
assortie pour le fils d’une femme aussi distinguée, aussi
instruite et aussi cultivée que Mme Dupin. C’est à tort que
plusieurs biographes de George Sand, surtout nos écrivains
russes de 1850 à 1880, nous présentent Marie-Aurore sous
les traits d’une « vieille aristocrate imbue de préjugés et
de morgue » ; nous allons bientôt voir à quel point elle
avait raison en s’opposant à ce mariage, et nous pouvons
déjà, dès à présent, comprendre les sentiments qui la guidaient.
Il se peut que Dupin se fût bientôt convaincu de la
justesse du jugement de sa mère, si celle-ci avait pu lui parler
avec calme et lui montrer combien son choix était peu satisfaisant,
mais l’affaire fut menée trop brusquement. Des personnes
bien intentionnées, Deschartres surtout, par leurs
cancans, leurs services maladroits et leur excès de zèle à
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