Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T1.djvu/157

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Il donnait sur les doigts d’Aurore des coups de règle comme il le faisait pour Hippolyte, et parfois même il lui administrait une bonne taloche. Et Aurore, toujours comme Hippolyte, tâchait de supporter stoïquement la douleur et de narguer les punitions.

La grand’maman, qui enseignait à sa petite-fille les premiers éléments de la musique, continuait ses leçons, et il ne faut point croire que ce fût le piano seul, mais encore la théorie et le solfège. George Sand pense que si son aïeule se fût occupée plus longtemps de son éducation musicale, elle serait devenue aussi bonne musicienne que la vieille dame elle-même, car elle avait le don et l’amour de la musique et souvent elle chantonnait pendant des heures entières des improvisations musicales tout en jouant dans la cour ou en bêchant son petit jardin. Pour des raisons que nous ne connaissons pas, mais probablement à cause de l’affaiblissement de sa santé, la grand’mère dut transmettre les leçons de musique à un certain Gayard, organiste à La Châtre, pédant et musicien médiocre. Il imposa des exercices à la fillette, lui fit apprendre par cœur de « petits morceaux », et la dégoûta complètement du piano ; Aurore abandonna entièrement la vraie musique sans avoir dépassé le niveau ordinaire du « tapotage des demoiselles ». Pour remplacer ses leçons de musique, la grand’mère entreprit d’enseigner à sa petite-fille l’histoire et la géographie et lui fit faire, dans ce but, des lectures quotidiennes, lui faisant brièvement résumer ce qu’elle avait lu, et se montrant très attentive au style de la narration. Ces leçons étaient les seules qui fussent du goût de la future George Sand, et ce fut ainsi que se déclara sa vocation. La grand’mère ne se donnait pas toujours la peine de contrôler l’exactitude