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son ignorance complète du catéchisme et des dogmes fondamentaux de la religion. Ses autres connaissances étaient à peu près dans le même état ; elle discutait sur les faits historiques, sans presque connaître la chronologie et les événements, et il en était de même en grammaire et en géographie.

Sous le rapport moral, le système d’éducation catholique que beaucoup de personnes jugent superficiellement et condamnent sans vouloir l’approfondir, offre cependant ce bon côté qu’il développe dans la jeunesse la volonté de lutter contre les penchants égoïstes, qu’il pousse vers une perfection continuelle, vers l’analyse incessante de soi-même et au désir de se spiritualiser. En même temps, la sévère discipline du couvent non seulement n’exclut pas les relations cordiales entre ses jeunes et ses vieilles habitantes, elle crée, au contraire, une intimité toute particulière et vraiment touchante entre ces femmes qui ont renoncé au monde et leurs élèves, pour la plupart jeunes filles correctes, affables envers leurs compagnes et celles des religieuses qui s’occupent spécialement de leur éducation en choisissant comme « filles » une ou plusieurs d’entre elles. Toute cette atmosphère d’amour placide, sans petites persécutions réciproques, sans jalousie, sans pleurs ni scènes d’aucune sorte, ce milieu où tout le monde s’aimait, mais où tout sentiment et toute pensée se portaient avant tout vers Dieu, était un véritable bienfait pour Aurore, élevée d’une manière si irrégulière.

Un autre avantage encore, c’était que la société joyeuse de ses compagnes empêchait l’enfant de se livrer à des réflexions prématurées sur l’avenir, sur la triste vie qu’elle avait eue et qu’elle aurait encore à passer entre sa grand’mère et sa mère, et sur la nécessité où elle serait de