Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T1.djvu/225

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que, quoiqu’il n’osât pas disputer contre sa « maman », elle pourrait bien — puisqu’elle allait mieux, — remplir les formalités catholiques. Lui, archevêque, l’empêcherait ainsi de tomber en enfer, où elle irait infailliblement, il en était sûr, malgré tout son amour pour « maman », si elle ne s’y soumettait pas. Ce discours baroque et d’un comique achevé à force de candeur dévote, fit sourire Marie-Aurore. Mais, voyant l’émotion d’Aurore, qui assistait à cette scène, connaissant sa foi profonde, ne voulant attrister ni son quasi beau-fils, ni sa petite-fille, ne voulant surtout pas lui faire encourir les reproches de qui que ce fût d’avoir laissé mourir sa grand’mère sans confession, elle consentit à faire ce qu’on demandait d’elle. L’archevêque se frotta les mains de joie, d’avoir « si bien bâclé cette affaire », dit, à plusieurs reprises, « qu’il fallait battre le fer pendant qu’il était chaud », et le lendemain même il fit venir le vieux curé rustique de Saint-Chartier pour confesser sa belle-mère. Aurore n’osait pas même s’en réjouir, tellement elle était indignée de la manière inconvenante, dont un prêtre, un archevêque, traitait les choses les plus sacrées de la religion. Mais Marie-Aurore, ayant tranquillisé son beau-fils par sa soumission à remplir ses devoirs religieux, sut aussi calmer l’âme angoissée d’Aurore. Elle fit assister la jeune fille à sa confession, avoua sincèrement qu’elle n’avait jamais donné de l’importance aux pratiques du culte, que depuis la mort de son fils, elle avait même complètement cessé de penser à Dieu, mais, qu’au fond de son cœur, elle n’avait jamais douté de son existence et qu’elle attendait de Lui son pardon, car Lui, qui sait et comprend tout, avait sûrement dû comprendre son désespoir. Cette confession ébranla complètement Aurore et le vieux curé villageois, qui prononça en pleurant les paroles d’abso-