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troublaient profondément son âme, sa nature ardente s’impatientait de n’y pas trouver spontanément de solution. Déjà dans ses premiers romans et nouvelles, elle avait touché à la question de l’inégalité sociale (Valentine, La Marquise) aux cruels problèmes moraux provenant de la constitution anormale de la famille et de la société (Indiana) ; depuis lors, ces questions devinrent familières à son âme ; le doute religieux, le néant de la morale publique la tourmentaient et l’angoissaient non moins que les préoccupations de sa vie personnelle.

Les idées saint-simoniennes, l’écho des événements récents, toutes les croyances de 1789, qui surgissaient de nouveau chez certains représentants de la société française, croyances qui ne cherchaient que l’occasion de s’exprimer et de s’appliquer, et qui se manifestaient dans les sectes, dans les clubs, dans l’épanouissement extraordinaire des lettres, des arts et de la vie politique, tout cela se reflète avec plus ou moins de vigueur, — parfois dans une seule phrase, parfois rien que dans le choix des mots, — dans chacune des œuvres de George Sand, même des plus insignifiantes.

En dépit de la division généralement reçue de ses romans en trois périodes (romans psychologiques jusqu’en 1838 à peu près ; romans à tendances sociales jusqu’en 1849 ; idylles villageoises[1] avec retour à la première manière, après 1849), division d’après laquelle George Sand n’aurait traité les questions sociales que dans la seconde de ces périodes, nous soutenons que, dès ses premiers pas dans la voie littéraire, tout comme après 1840, elle était

  1. Nous avons déjà dit plus haut, combien cette division des romans de George Sand en trois périodes était arbitraire par rapport à la peinture de la vie campagnarde.