Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/302

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Pendant les trois premières années après leur séparation volontaire, tout alla bien d’abord, et les deux époux, de part et d’autre, contents de leur indépendance, continuèrent à se traiter à l’amiable, en camarades bien calmes. Dudevant avait gardé pour lui les choses auxquelles, selon une lettre inédite d’Aurore[1], il tenait le plus : son domaine et ses revenus à elle, en n’envoyant à sa femme qu’une rente très modique, qui lui suffisait à peine pour vivre.

Elle ne s’en plaignait pas cependant, surtout, parce qu’elle commençait à se sentir indépendante, qu’elle avait déjà acquis une certaine notoriété et commençait à gagner sa vie. Elle allait tous les trois mois à Nohant et presque toujours, son mari soit seul, soit avec le petit Maurice, l’accompagnait ou venait à sa rencontre jusqu’à La Châtre ou à Châteauroux. En 1832, Aurore prit avec elle Solange et au mois de mai 1833, Maurice fut aussi amené à Paris et placé au collège Henri IV. Lorsqu’il venait à Paris, Casimir dînait chez sa femme, l’accompagnait au théâtre, mais ne descendait pas chez elle pour n’être gênés ni l’un ni l’autre. C’est ce qu’il lui écrit dans une de ses lettres :


5 décembre 1831.

« J’ai reçu ta lettre il y a dix jours, qui m’a fait plaisir ; vaut mieux tard que jamais, dit-on, j’y aurais répondu plus tôt, mais Mme Hippolyte a reçu une lettre de toi le lendemain de la mienne… Je pars mercredi ou jeudi au plus tard pour Paris, j’y serai samedi matin probablement, je descendrai chez Hippolyte, parce que je ne veux te gêner nullement, ni par conséquent être gêné, ce qui est bien juste.

  1. Lettre du 12 novembre 1835 à Hippolyte Châtiron.