Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/467

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raillerie, a un profond mépris pour le public, qu’elle appelle Jumento.

« Je vous raconterai les immenses et secrets dévouements de cette femme pour ces deux hommes, et vous vous direz qu’il n’y a rien de commun entre les anges et les démons. Toutes les sottises qu’elle a faites sont des titres de gloire aux yeux des âmes belles et grandes. Elle a été dupe de la Dorval, de Bocage, de Lamennais, etc., etc. ; par le même sentiment, elle est dupe de Liszt et de Mme d’Agoult ; mais elle vient de le voir pour ce couple comme pour la Dorval, car elle est de ces esprits qui sont puissants dans le cabinet, dans l’intelligence, et fort attrapables sur le terrain des réalités.

« C’est à propos de Liszt et de Mme d’Agoult qu’elle m’a donné le sujet des Galériens ou des Amours forcés, que je vais faire, car dans sa position elle ne le peut pas. Gardez bien ce secret-là. Enfin, c’est un homme et d’autant plus un homme qu’elle veut l’être, qu’elle est sortie du rôle de femme, et qu’elle n’est pas femme. La femme attire, et elle repousse, et, comme je suis très homme, si elle me fait cet effet-là, elle doit le produire sur les hommes qui me sont similaires ; elle sera toujours malheureuse. Ainsi, elle aime maintenant un homme qui lui est inférieur, et, dans ce contrat-là, il n’y a que désenchantement et déception pour une femme qui a une belle âme ; il faut qu’une femme aime toujours un homme qui lui soit supérieur, ou qu’elle y soit si bien trompée que ce soit comme si ça était.

« Je n’ai pas été impunément à Nohant, j’en ai rapporté un énorme vice : elle m’a fait fumer un houka et du Latakieh ; c’est devenu tout à coup un besoin pour moi… »

Après ce séjour de Balzac à Nohant, ses relations avec George Sand devinrent encore plus amicales ; une corres-