Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/85

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naguère aimée ? Et nous persistions, après cela, à l’appeler délicat, distingué et gentleman ? Mais cet ignoble bavardage n’aurait jamais pu sortir de sa bouche. Et l’on voudrait nous faire croire qu’il commît cette indiscrétion de parti pris, afin de se venger, afin de dévoiler quelque chose ? Et à qui voudrait-on attribuer une action aussi basse, aussi mesquine ? À notre poète bien-aimé, à l’un de nos rares élus, à ce raffiné, tant au-dessus de la tourbe grossière ! Non, quoi qu’il ait pu souffrir, quelques aveux que George Sand ait pu faire plus tard, nous ne croyons pas, nous nous refusons à croire que Musset ait pu agir si vilainement. Nous rejetons donc tout le poids de cette communication sur le compte de ses zélés biographes, et disons ce qui a été plus d’une fois dit de Musset : Quoi qu’il ait souffert, jamais pendant sa vie il n’a prononcé un mot pour accuser George Sand ; jusqu’au moment suprême, il a su rester le gentilhomme correct envers la femme naguère aimée, il est resté tel que l’ont connu tous ses amis et tous les objets de son amour. Et c’est pour cela que nous nous permettons de nier l’authenticité de la prétendue communication.

Une fois que George Sand, Musset et Pagello ne disent eux-mêmes rien de semblable, pourquoi croirions-nous à cette ignoble histoire ? Qui nous ferait croire à sa réalité ? Laissons donc ce grossier récit à la responsabilité des officieux amis de Musset et oublions bien vite qu’ils ont voulu le mêler à la propagation de cette légende odieuse et psychologiquement incroyable[1]. Mettant au rancart tous ces potins, passons plutôt au sobre récit et

  1. M. Maurice Clouard, quoique partisan de Musset, a eu le courage d’être impartial en énonçant l’opinion suivante, en tout analogue à la nôtre : « Mais c’est Paul de Musset et non Alfred qui a écrit cela, et pas