Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T3.djvu/180

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tour. Mais je ne me repens pas. J’ai Mme Dorval et tout ce qu’il y a de mieux en acteurs. Mlle Mars n’en est pas moins charmante avec moi. Elle désire que je lui fasse une pièce, et je tâcherai, si j’ai un succès pour la première. Je compte toujours sur toi pour claquer, et Pierret[1] ne se lave plus les mains, afin de les avoir plus épaisses ce jour-là. Bonsoir, mon vieux, ne rêve pas trop à la Divine[2], tu as le temps de te renflammer…[3].

Le 27 février, elle lui annonce pourtant que la pièce est toujours « à la veille d’entrer en répétitions » et qu’à son avis cette « veille » sera celle du jugement dernier, que le comité du théâtre « se prend aux cheveux avec le ministère », qu’on parle même de la dissolution de toute la société de la Comédie, que « le ministre veut donner sa démission prétendant qu’il aimerait mieux gouverner une bande d’anthropophages que les comédiens du Théâtre-Français », que « Buloz perd l’esprit qui lui reste », et qu’elle, « tâche d’attendre avec patience la fin de la bataille ».

… Pour couronner tous mes ennuis, j’aurai peut-être une sifflade de première classe et force pommes plus ou moins cuites. Enfin, vogue la galère ! Que j’aie un succès ou une chute, j’irai me reposer à Nouant de la vie de Paris, à laquelle je ne me fais pas et ne me ferai, je crois, jamais…[4].

Le 25 mars, elle invite son ami Gustave Papet à venir à Paris, espérant que la pièce va être jouée dans les premiers jours d’avril.

Cher Papiche, ma pièce sera jouée pour sûr dans les huit premiers jours d’avril. Viens, car tu me l’as promis. La pièce ne vaut pas le diable. Mais l’envie que nous avons de te voir vaut bien que tu fasses le voyage. J’ai pour toi la table, le logement, la chandelle, le tabac, le domino, le vin, le thé et tout ce qui s’ensuit. Tu descendras rue Pigalle, n° 16, n’importe à quelle heure de jour ou de nuit. Ainsi, viens !

  1. Si le lecteur se rappelle, c’était^un ami intime de Sophie-Antoinette Dupin, mère de Mme Sand.
  2. C’est-à-dire Mme Dorval.
  3. Inédite.
  4. Corresp., t II, p. 150-151.