Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T3.djvu/688

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ce fût une histoire aussi simple, aussi droite et aussi peu ornée que le sillon qu’il traçait avec sa charrue ».

L’année prochaine, ce sillon sera comblé et couvert par un sillon nouveau. Ainsi s’imprime et disparaît la trace de la plupart des hommes dans les champs de l’humanité. Un peu de terre l’efface, et les sillons que nous avons creusés se succèdent les uns aux autres comme les tombes dans le cimetière. Le sillon du laboureur ne vaut-il pas celui de l’oisif, qui a pourtant un nom, un nom qui restera, si, par une singularité ou une absurdité quelconques, il fait un peu de bruit dans le monde ?…

Eh bien, arrachons, s’il se peut, au néant de l’oubli, le sillon de Germain, le fin laboureur. Il n’en saura rien et ne s’en inquiétera guère ; mais j’aurai eu quelque plaisir à le tenter…


Et George Sand nous raconte cette histoire qu’elle prétend lui avoir été contée par Germain lui-même. Nous ne la redisons pas : elle est trop connue.

Comme épilogue, l’auteur a ajouté à ce roman une étude mi-ethnographique, mi-romanesque, sous le titre de : les Noces de campagne. Il y décrit non seulement le mariage de Marie et de Germain, mais toutes les coutumes matrimoniales du Berry, présentant (ainsi que tous les vieux usages de tous les pays d’Europe, et surtout de coins aussi oubliés qu’était le Berry vers 1830-1840) un mélange extraordinaire de cérémonies de l’antique paganisme et des rites chrétiens. En Berry ce mélange était encore compliqué, parce que les différentes nations ayant autrefois peuplé le centre de la France, les Celtes, les Gaulois, les Romains, y avaient tous laissé leurs us et coutumes. Ces us et coutumes se fondirent avec les rites nuptiaux archaïques, communs à toute l’Europe et témoignant clairement qu’ils remontent à l’époque où les anciens d’une tribu exigeaient le payement d’une amende pour le rapt d’une fiancée. (Les réminiscences de ces rites peuvent être découverts non seulement dans les noces de campagne, mais jusque dans les cérémonies nuptiales du monde le plus snob !) George Sand note bien finement tous ces rites, toutes ces coutumes, chansons, mots d’usage et dictons, qu’on pratique, chante et