Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/138

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et dans ses lettres, jugeait sévèrement Louis Blanc, comme un « meneur » et un « sectaire » et allait jusqu’à se moquer de « cette grande ambition dans un petit corps »[1] ; qui appelait Barbès un « factieux » et « pire qu’un factieux », parce qu’il se laissait gouverner par la néfaste maxime : Qui veut la fin veut les moyens, maxime si justement réprouvée par George Sand comme criminelle, — alors cette même George Sand, disons-nous, prit ouvertement la défense de Louis Blanc et de Barbès dans le journal de Thoré. Elle y publia deux articles sur Louis Blanc[2], et un article sur Barbès[3]. De plus, le 7 août, George Sand envoya à Girerd une lettre de Milnes (reçue le 8 ou le 10 juin), « qui peut servir à la défense de Louis Blanc. » Et on ne peut assez apprécier ces deux courageuses et nobles levées de lances en faveur d’hommes dont les noms mêmes étaient prononcés « avec horreur et terreur », comme ceux de malfaiteurs et de meurtriers sanguinaires.

À Barbès lui-même, incarcéré à Vincennes et qui avait écrit à George Sand pour lui dire qu’il était sain et sauf, elle écrit le 10 juin de Nohant :

Je n’ai reçu votre lettre qu’aujourd’hui 10 juin, cher et admirable ami. Je vous remercie de cette bonne pensée, j’en avais besoin ; car je n’ai pas passé une heure depuis le 15 mai, sans penser à vous et sans me tourmenter de votre situation. Je sais que cela vous occupe moins que nous ; mais enfin il m’est doux d’apprendre qu’elle est devenue matériellement supportable.

Ah ! oui, je vous assure que je n’ai pas goûté la chaleur d’un rayon de soleil sans me le reprocher, en quelque sorte, en songeant que vous

  1. V. plus haut, p. 9.
  2. Le premier article, Louis Blanc, réimprimé dans le volume des Souvenirs de 1848, sous le titre de Louis Blanc au Luxembourg, parut dans la Vraie République, le 2 et 3 juin. Le second, qui parut le 11 juin, fut écrit en forme de simple Lettre à Théophile Thoré. Dans le volume des Souvenirs de 1848, on le munit d’un sous-titre : Sur la mise en accusation de Louis Blanc, et pourtant la rédaction de la Vraie République l’avait fait précéder de la petite note que voici : « Cet article n’est pas une défense. Il nous a été envoyé par notre collaborateur avant qu’on connût les projets d’accusation qui en font un article de circonstance. »
  3. Parut dans la Vraie République, le 9 juin, réimprimé aussi dans le volume des Souvenirs de 1848.