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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/222

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fraternelle et chrétienne, sans laquelle nous n’aurons pas de république durable. Nous passerons par d’autres dictatures, Dieu sait lesquelles ! Quand le peuple aura fait de douloureuses expériences, il s’apercevra qu’il ne peut pas se personnifier dans un homme et que Dieu ne veut pas bénir une erreur qui n’est plus de notre siècle. En attendant, c’est nous, républicains, qui serons encore victimes de ces orages. Probablement, nous serions sages si nous attendions, pour rappeler le peuple à ses vrais devoirs, qu’il comprît ses erreurs et qu’il se repentît de lui-même de nous avoir considérés comme une poignée de scélérats qu’il fallait abandonner, livrer, dénoncer aux fureurs de la réaction.

Bonsoir, mon ami ; je t’embrasse et regrette bien que tu sois toujours là-bas quand je suis ici. Ma santé ne se rétablit pas encore, je me suis beaucoup fatiguée pour obtenir jusqu’ici beaucoup moins qu’on ne m’avait promis ; je m’en prends surtout au désordre effrayant qui règne dans cette sinistre branche de l’administration, et à la préoccupation où les élections tiennent le pouvoir. Je crois que l’amnistie viendra ensuite. Si elle ne vient pas, je recommencerai mes démarches pour arracher du moins à la souffrance et à l’agonie le plus de victimes que je pourrai ; on m’en récompense par des calomnies, c’est dans l’ordre, je n’y veux pas faire attention… »

En voyant que l’amnistie générale tardait à venir et qu’en attendant les commissions chargées de la révision des procès, les délégués spéciaux de l’empereur envoyés dans les provinces avaient fait preuve d’insigne négligence dans la manière dont ils s’acquittaient de la révision des procès-verbaux et des actes d’accusation contre des personnes particulières, George Sand reprend la plume pour écrire à Napoléon ; elle lui envoie de nouvelles lettres, elle s’empresse de nouveau de lui faire part des déportations dont des innocents sont menacés, elle le supplie de les faire revenir, si ces personnes sont déjà en route pour là-bas. Voici encore trois de ses lettres au prince-président, dont les deux premières écrites au mois de mai 1852 sont datées de « mars » dans la Correspondance, et la troisième est bien du 27 juin, ce qui est confirmé par une note de George Sand sur le brouillon de la liste des personnes pour lesquelles elle demandait une fois de plus : « Envoyé au président le 28 juin », et par la réponse du général Roguet, datée du 29 juin, lui disait encore qu’il avait