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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/347

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qui porte le nom estropié de Kologrigoff et, on ne sait pas trop pourquoi, parle français avec un accent allemand !). Et au milieu de toutes ces petites scènes bouffonnes, voilà que surgissent tout à coup deux épisodes ou deux morceaux fort poétiques : une page lyrique adressée à l’âne qui portait la petite Aurore sur son dos de Paris à Chaillot, et une autre page que l’auteur prétend être fortuitement trouvée dans son journal, intitulée les Corbeaux et écrite dans un style parfaitement imité de Chateaubriand ou… de Lélia. Puis, dans la Seconde partie : Voyage en Espagne, Aurore Dudevant raconte à peu près tout ce qu’elle conta plus tard dans l’Histoire de ma vie du voyage qu’elle fit avec sa mère pour rejoindre M. Dupin en Espagne et toutes ses impressions enfantines d’alors. Nous ne nous arrêterons point sur cette fin de la première partie du Journal de voyage, surtout important comme témoignage du talent inné et spontané de George Sand. Il se dégage de ces lignes écrites au courant de la plume, tant de précision dans les expressions, tant d’observation des caractères, tant de puissance poétique, d’humour et tant de nostalgie désespérée qu’on a peine à croire que leur auteur n’était qu’une femme de vingt-trois ans, mariée à un hobereau médiocre, passant ses vacances dans mie ville d’eaux, au milieu d’un tas d’adorateurs ennuyeux, et qui joue de sa plume comme d’autres jouent de l’éventail. Nous avons déjà noté cet éveil spontané du talent de George Sand ; ce qui nous importe c’est de marquer la ressemblance des Souvenirs d’Auvergne avec l’Histoire de ma vie. Ce n’est pas seulement le plan général, mais même la manière de raconter, le procédé et le point de départ sont identiques. Il est vrai que la jeune femme de vingt-trois ans ne peint que ses sentiments personnels et ses propres pensées, tandis que la femme de quarante-trois trouve nécessaire de mêler à son récit des réflexions et des raisonnements sur des thèmes généraux. Mais, dès que la narration touche à des événements trop intimes, nous voyons apparaître à la place de George Sand, l’auteur du Voyage au Mont-Dore. Si on n’envisage que les deux préfaces, on peut croire que les deux auteurs avaient deux buts différents. « Pourquoi ce livre ? » Aurore Dudevant répond : pour