Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/575

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bien et du mal, Aurore Dupin se pénétra de la doctrine de saint Jean et l’opposa à celle de saint Pierre, l’apôtre de l’Église militante, intolérante[1]. À la fin de sa carrière, après toutes les épreuves de son existence privée et sociale, après avoir passé par tant de doctrines, de systèmes philosophiques les plus divers et traversé tant de cataclysmes politiques, George Sand resta fidèle à l’enseignement de saint Jean et ce sont les paroles de cet évangéliste qu’elle adresse à ses concitoyens à l’heure terrible de la folie générale et de l’effondrement social. C’est comme le Hic jacet de Spiridion, c’est ici que se trouve la clef de toutes ses opinions politiques, de toutes ses théories sociales. Elle dit dans la lettre à Flaubert, et nous avons déjà cité ces mots dans le chapitre sur 1848 :

Plus que jamais je sens le besoin d’élever ce qui est bas et de relever

ce qui est tombé. Jusqu’à ce que mon cœur s’épuise, il sera ouvert à la pitié, il prendra le parti du faible et réhabilitera le calomnié. Si c’est aujourd’hui le peuple qui est sous les pieds, je lui tendrai la main ; si c’est lui qui est l’oppresseur et le bourreau, je lui dirai qu’il est lâche et odieux. Que m’importent tels ou tels groupes d’hommes, tels noms propres devenus drapeaux, telles personnalités devenues réclames ?

Je ne connais que des sages et des fous, des innocents et des coupables…

Ceci explique ses agissements en 1848-49, les espérances qu’elle fondait sur Louis-Napoléon Bonaparte — le réformateur social — et son horreur devant le coup d’État et le régime de Napoléon III ; son enthousiasme à l’avènement de la République en 1870 et son horreur devant la Commune de 1871. George Sand resta fidèle à elle-même. Elle se déclarait alors un ennemi juré de la politique. Elle le dit sans ambages dans sa Réponse à une amie, le numéro vu des Impressions et souvenirs qui est une suite et une conclusion de sa Réponse à un ami : « Je méprise profondément la politique. »

La question principale que George Sand examine dans cet article c’est ce même suffrage universel qui excitait l’Hhhindi-

  1. Voir notre vol. I, chap. iv, et le présent vol., chap. ix.