Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/611

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un bâtard. Si cela était, lui qui devait veiller sur les intérêts du second enfant, doit le laisser déposséder. Gaston ne peut donc ni rentrer en possession de l’héritage paternel, ni être adopté par M. de Salcède, le chevaleresque ami de sa mère : cette adoption porterait atteinte à la vertu de la comtesse de Flamarande. Gaston le comprend et se résout à rester paysan. Roger, qui l’adore, continuera à le considérer comme son frère et à l’aider, mais lui seul portera le nom de Flamarande. Ce n’est pas tout encore. La comtesse de Flamarande, bien qu’elle aime toujours M. de Salcède, qui n’a pas cessé de l’aimer, le cède à son ex-rivale, son amie désintéressée, la baronne de Montespar. Tous s’embrouillent dans des finesses exquises d’une sollicitude extrême pour sauvegarder à la fois l’honneur du feu comte de Flamarande, ce fou stupidement jaloux, et la réputation immaculée de la comtesse. Gaston, resté au village sous son ancien nom d’Espérance, épouse la fille de Michelin, le paysan qui l’avait jadis recueilli. Seul le vieux valet est puni. Ce M. Chariot qui avait commencé par n’être que l’agent docile des volontés du vieux Flamarande et qui finit par vouloir s’instituer juge et arbitre du sort de Mme de Flamarande, de Gaston et de M. de Salcède, poussé par un sentiment personnel dont il ne veut pas se rendre compte, éveille le dégoût et le mépris dans le cœur de Roger. Ce malheureux valet, animé des intentions les meilleures, comprend, trop tard, qu’en écoutant aux portes, en se mêlant des affaires sentimentales qui ne le regardaient pas, il n’a fait que se rendre haïssable et n’a plus qu’à disparaître. Et ce n’est que justice.

On lit dans la Correspondance entre G. Sand et G. Flaubert les lignes suivantes écrites au printemps de 1876, après la lecture de ces deux volumes[1] :

« Parlons de vos livres… Ils m’ont amusé et la preuve c’est que j’ai avalé d’un trait et l’un après l’autre Flamarande et les Deux Frères. Quelle charmante femme que Mme de Flamarande et quel homme que M. de Salcède ! Le récit du rapt de

  1. Flamarande fut publié dans la Revue des Deux Mondes, en 1875.