Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/630

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une sorte d’entêtement puéril, répétant continuellement : « Lavez-moi, lavez-moi », etc., jusqu’à ce qu’on lui obéît.

À plusieurs reprises elle nous dit : « Ayez pitié, mes enfants, ayez pitié ! »

Vers 2 heures elle répéta six ou sept fois de suite : « La mort, mon Dieu, la mort ! »

À 3 heures du matin, marchant sans bruit, M. Maurice se présenta sur le seuil de la porte qui sépare le cabinet de la chambre à coucher, la porte restée ouverte, sa mère le vit aussitôt et lui dit : « Non, non, va-t’en, va-t’en !… »

Cette nuit-là Mme Sand l’a passée sur un lit de fer placé au milieu de sa chambre vis-à-vis la cheminée. Vers 6 heures du matin, la malade cherchant du regard la lumière, Mme Solange changea la direction du lit de façon que sa mère eût la fenêtre en face. C’est sur ce lit qu’elle est morte. Ce changement de lit avait été nécessité par les manœuvres incessantes qu’on était obligé de faire pour la changer de position.

… Le 8 juin, vers 6 heures du matin, j’étais sorti. Il y avait près d’elle Mme Maurice, Mme Solange, René Simonnet, Oscar Cazamajou et le docteur Favre[1]. Elle dit : « Adieu, adieu, je vais mourir, adieu Lina, adieu Maurice, adieu Lolo, ad… » Elle voulait ajouter certainement : « Adieu Titite », mais elle ne put et ce furent ses dernières paroles. (Je me le rappelle fort bien, car cela m’a beaucoup frappée : elle entra tout de suite après en agonie », ajouta à ces mots Lina Sand.)

Plus tard on raconta — (malheureusement Henry Harrisse a cru pouvoir intercaler ce brin de légende dans sa narration manuscrite si exacte) — donc, plus tard on prétendit que les toutes dernières paroles de Mme Sand furent : « Laissez verdure. » Ceci est faux. Le docteur Pestel et Mme Lina Sand assurent d’une manière catégorique que ces mots ne furent point prononcés le jour de sa mort, mais la veille, à 9 heures du soir, lorsqu’il y avait près de Mme Sand, Mmes Solange et Lina. Le doc-

  1. Aurore et Gabrielle — dit M. Harrisse dans une note à la p. 16 de sa plaquette — n’étaient pas présentes ; lorsqu’ayant été appelées, elles s’approchèrent du chevet de leur grand’mère, celle-ci avait cessé de vivre. Maurice dormait dans sa chambre accablé de chagrin et de fatigue. Ce furent ses fillettes qui vinrent lui apprendre la mort. Il s’assit, puis il s’abîma dans son désespoir. Il répétait au milieu de ses sanglots : « Ma mère, ma mère ! La vie pour nous est finie ! »