Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T4.djvu/67

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dans les mêmes termes qu’employait Fra Angelo dans le Piccinino, pour caractériser le régime bourgeois :

… Habitants des campagnes, connaissez vos véritables intérêts, et repoussez les fatales suggestions de l’égoïsme et de la peur. Habituez-vous à comprendre la vérité sociale. La vérité sociale est que lorsque chacun pense exclusivement à son propre intérêt, sans tenir compte de celui de tous, il marche à sa ruine. Le gouvernement qui vient de s’écrouler sans retour prêchait la doctrine du chacun pour soi. Vous avez vu où il nous a conduits, et les maux dont vous souffrez aujourd’hui sont encore son ouvrage…

Quant au Bulletin n° 8, c’est en même temps un exposé un peu étendu d’une phrase de la Lettre à la classe moyenne, et une périphrase de l’Histoire de France écrite sous la dictée de Blaise Bonnin.

« Pour que les élections satisfassent le peuple, il est de toute nécessité que le peuple soit personnellement représenté… par deux citoyens au moins par département, choisis dans le sein même du peuple : un ouvrier des villes et un paysan » — avait dit George Sand dans sa Lettre à la classe moyenne.

Et Blaise Bonnin, ce prétendu auteur de la Lettre en langue d’oil (autrement dite Histoire de France racontée au peuple), dit fort spirituellement que lorsqu’il avait lu « sur les journaux que le monde de Paris avaient tous fait la paix, les riches comme les malheureux… » et qu’on avait aussi « mis sur les journaux que le seul moyen de s’accorder c’était de se mettre en République, ça l’avait fait se souvenir

… du temps que j’étais jeune et quasiment un enfant tout au juste en état de mener mes bêtes aux champs. Et dans ce temps-là, on se disait aussi citoyens, et on jurait la République. Mais ils s’en sont fatigués, à cause que les riches trompaient toujours les pauvres, ce qui était une chose injuste ; et à cause aussi que les pauvres avaient fait mourir ou ensauver beaucoup de riches pour en tirer une vengeance, ce qui n’était pas juste non plus. Alors on s’est mis en guerre avec les Autrichiens, Prussiens, Russiens et autres mondes étrangers, et la République a fini comme une nuée d’orage qui s’est tout égouttée…

Mais, — dit plus loin Blaise Bonnin, — on s’est imaginé qu’il fallait un homme tout seul au gouvernement et on en a pris un qui n’était