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ROMAIN D’ÉTRETAT.

remonte en nuages, pour retourner aux fleuves, sans qu’une goutte d’eau puisse se perdre ni se dérober à ses fonctions éternellement prescrites ; que d’avoir changé de l’eau en vin, ce que savent faire tous les cabaretiers ?

À onze heures, tout le monde reposait. Bérénice sortit sans bruit, et alla trouver Romain. Romain était résolu. Il ne voulait pas partir.

— Il suffit, dit-il, qu’on ne me voie pas pendant quelque temps ; on m’oubliera.

En effet, Romain ne parut plus dans la paroisse ; les uns pensaient qu’il avait rejoint ses compagnons sur la route, d’autres qu’il s’était embarqué clandestinement sur quelque navire. Bérénice s’échappait tous les soirs quand tout le monde dormait, et rentrait une heure après.

Il ne tarda pas à venir de la sous-préfecture au maire la nouvelle que Romain n’avait pas rejoint le corps qui lui avait été indiqué. Le sous-préfet joignait à ce renseignement l’ordre de le faire partir ; mais cet ordre devait être exécuté par deux gendarmes. Tout ce qu’on put répondre aux gendarmes et au sous-préfet, c’est que Romain avait complètement disparu.