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ROMAIN D’ÉTRETAT.

une vache et eut une domestique. Tous les garçons la courtisaient et la voulaient épouser. Mais elle répondait sérieusement qu’elle ne se marierait pas. Il n’était bruit que de sa sagesse ; même à la fontaine, où se contaient toutes les histoires du pays, on ne lui prêtait aucune intrigue.

Cependant on finit par voir que Bérénice était enceinte. Elle accoucha, et ne trouva qu’à grand’-peine un parrain et une marraine pour son enfant, qui fut baptisé sous le nom d’Onésime, fils de Bérénice, père inconnu… Le père de Bérénice lui-même ne voulut plus la voir. Néanmoins Bérénice ne se désespérait pas.

Arriva 1814. Le corps d’armée où servait Samuel Aubry fut licencié. Samuel Aubry revint dans ses foyers avec deux ou trois camarades, seuls vivants d’une douzaine qu’ils étaient partis d’Étretat. Leur retour fit la plus vive sensation. Samuel surtout, chevalier de la Légion d’honneur, fut incroyablement fêté. Tous les honneurs furent pour lui. Son morceau de pain bénit à l’église n’était pas beaucoup moins gros que celui du dépositaire de l’autorité municipale.