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CONTES ET NOUVELLES.

jour sera venu où nous pourrons nous réunir, je viendrai te chercher, et nos deux âmes, confondues, s’élèveront pour ne plus redescendre sur une terre où elles n’auront plus aucun lien. Chaque année, au jour de ma naissance, heureux ou malheureux, aimé ou abandonné, triste ou gai, à l’heure où le soleil se couche, à l’heure où les prières montent au ciel avec les sons de la cloche du soir et le parfum qu’exhalent les fleurs avant de fermer leur calice, tu joueras cet air qui a si longtemps pour nous charmé les douleurs de l’absence, seule consolation qui te restera dans une bien longue séparation. Cette musique sera plus harmonieuse à mon âme que les concerts des séraphins.

Puis elle l’embrassa et mourut.

Rodolphe devint fou. On le fit voyager quelque temps. À son retour, sa tête était plus calme ; mais une sombre mélancolie s’empara de lui et ne le quitta plus. Il se renferma dans sa maison, sans y vouloir recevoir personne, sans vouloir sortir et aller nulle part. Il laissa la chambre de Berthe telle qu’elle se trouvait au