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CONTES ET NOUVELLES.

met neigeux ; le lac d’un bleu foncé à l’ombre, et blanc comme un miroir sous les rayons ardents du soleil.

— Et, dis-je, les beaux platanes au-dessus des bancs du Signal, et les forêts vertes pleines de violettes et de fraises ?

— Oui, dit-elle, et, plus que cela, les riantes et libres pensées qui s’exhalaient de toutes ces choses. Pensées, ajouta-t-elle tout bas, comme se parlant à elle-même, qui se sont fanées avec les violettes, et qui n’ont pas refleuri avec elles et ne refleuriront plus.

Elle resta alors comme absorbée, et son visage fut longtemps sans reprendre son habituelle expression de malice. Nous fûmes quelque temps sans parler ; on se leva de table, et, de la soirée, je ne me trouvai plus auprès de Fanny.

Le soir, madame Gautherot me demanda quand je partais. Je répondis, presque sans savoir pourquoi ni comment, que j’attendais une lettre de mon oncle.

— Eh bien, me dit-elle, si vous voulez demain entendre une messe, avec de la musique, nous vous donnerons une place dans notre banc.