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Page:Karr - Contes et nouvelles, 1867.djvu/44

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CONTES ET NOUVELLES.

Ce papier sûr lequel vous écrivez, et que vous renfermez sans doute avec votre linge, a ce doux et vague parfum que l’on respire auprès de vous, et qui semble être votre haleine. Avec ce talisman, j’ai retrouvé tout mon courage, et je vais dès demain faire sans hésiter une démarche qui m’était désagréable. On dit que le sentier de la vertu est étroit, et il semblerait que je veuille arriver au bonheur par une grande route pavée et bordée d’ormes : je ne me laisserai plus donner par vous l’exemple de la résolution.

J’ai ri de votre idée de prendre mon oncle Éloi au mot dans ses airs d’Amadis et de le mettre à l’épreuve. S’il vous faut répondre relativement au salon de votre amie, il y a dans Rabelais trois lignes qui peuvent venir à votre secours ; les voici :

« Dont, par iuste perspetisue, yssoit une couleur innommée qui résiouyssoyt merveilleusement les yeulx des spectateurs. »

Demandez à mon oncle une tenture précisément de cette couleur. Cela nous donnera tout le temps dont nous avons besoin.

Écrivez-moi, mon cher ange, aussi souvent