Page:Karr - Contes et nouvelles, 1867.djvu/97

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
91
ROMAIN D’ÉTRETAT.

les femmes vivent ensemble, ils en sont encore à ne pas se connaître et à chercher à s’attraper.

L’homme exagère sa force et son courage, comme la femme exagère sa faiblesse et sa timidité. Il n’y a que l’ennui que les femmes redoutent ; l’ennui seul les fatigue, l’ennui seul les tue. Une femme ne meurt jamais que d’ennui ; à soixante-quinze ans une femme ne meurt pas parce qu’elle est vieille, mais parce qu’on ne l’amuse plus. Une femme qui s’amuse est de fer et d’airain ; il n’y a pas de portefaix capable de suivre tout un hiver dans le monde la plus frêle, de nos femmes, si elle est jolie, si elle a beaucoup de toilettes fraîches, si elle a du succès ; à la moitié de la saison, le portefaix, exténué, demandera à aller porter des sacs de farine pour se reposer, et rétablir sa santé. Nous ne sommes le sexe fort que parce que nous ne sommes pas le beau sexe ; sans la faiblesse qu’affichent les femmes adroites, notre force paraîtrait piteuse, et nous ne serions plus rien du tout.

Toutes ces jeunes femmes aussi vont faire la guerre : ce sont elles qui vont envahir l’Angleterre ; elles vont faire une exhibition de cheveux