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MAUVAISES NOUVELLES

l’avoir tué. Ces chiens ont déjà goûté de mon fouet, mais s’ils en désirent encore, ils l’auront. Féodor assemble mes gardes, et toi, Cyril, cours appeler le père Sylvestre ! »

Passer d’une fête au combat, c’était une chose journalière pour le Prince de Kief et ses guerriers ; et sur le temps que Sylvestre arriva, la place vis à vis du Palais fut comblée d’hommes armés dont le visage hardi et vigoureux, les armes étincelantes et l’équipement en ordre, pouvaient satisfaire les plus rigoureux commandants.

— « Père », dit Vladimir au moine, « je vais m’en aller combattre ces loups tartares qui sont en train d’anéantir mon peuple. Mon fidèle Sviatagor, là » (et il montra un vieux chef grimaçant, borgne, et à la barbe grise et longue) « commandera la ville en mon absence ; et je vous prie, père, de l’aider de vos conseils, car en vous repose notre force suprême. »

— « Que Dieu puisse être avec toi, mon fils », répliqua Sylvestre ; « et si mes conseils peuvent faire quelques biens, sois assuré qu’ils ne feront pas défaut.

Les dernières préparations furent bientôt terminées et les gardes du Prince s’assemblèrent autour de leur chef. Féodor qui les avait jusque là commandés, pâlit en apprenant qu’il devait rester en ville pour aider Sviatagor, mais il ne fit aucune objection.

À ce moment Cyril vint au Prince et lui demanda de lui laisser accompagner l’armée dans sa marche vers le Sud.

— « Quoi ! » s’écria Vladimir, le regardant fixement, « tu veux venir avec nous pour lutter contre tes compatriotes ? »

— « J’ai juré de vous être fidèle dans la vie comme dans la mort, Vladimir Sviatoslavovitch », répondit le jeune tartare, subissant le regard du Prince sans fléchir. « Avez-vous peur que je ne tienne pas ma parole ? »

— « Non. non, mon enfant, reprit le grand guerrier, joyeusement, « je sais que tu ne le feras jamais. Si le père Sylvestre ne peut pas t’employer ici, tu pourras nous accompagner et tu seras le bienvenu. »

— « Je le laisserai bien avec plaisir aller avec toi et tes hommes, puisqu’il y tient, » répliqua le moine ; « mais je suis persuadé — quoique en vérité je ne sais pas pourquoi — que son séjour ici sera de grande importance pour nous tous. »

— « Si vous parlez ainsi, père, naturellement je resterai », répondit Cyril, se tournant pour cacher le regard de désappointement amer qui obscurcissait son ardente figure.

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Une demi-heure plus tard Vladimir et ses soldats descendaient