Page:Kerigant - Les Chouans - Épisodes des guerres de l’Ouest dans les Côtes-du-Nord, 1882.djvu/34

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Nul n’était sûr du lendemain, à cette époque où la délation était partout, ne laissant ni trève[sic] ni repos à personne. Plusieurs qui paraissaient approuver les extravagances révolutionnaires n’en étaient pas moins en butte aux dénonciations des plus vils coquins, agents secrets du pouvoir et souvent l’exerçant eux-mêmes. Émigrer ou se défendre, comme le firent les Vendéens et les Bretons, les honnêtes gens n’avaient guère d’autre alternative. Il suffisait, riche ou non, d’appartenir à une certaine classe, d’avoir une tenue réservée, pour devenir suspect et être incarcéré.

Ainsi advint-il à la mère de la jeune personne devenue célèbre dans le pays par suite de la mort de Boishardy. Bien que veuve et vivant fort retirée, Mme  Quintin de Kergadiou fut arrêtée et séparée de ses enfants. Dans cette situation affreuse, n’ayant près d’elle personne pour lui venir en aide, elle avait confié la garde de sa fille, à peine âgée de seize à dix-sept ans, à la loyauté d’un voisin, d’un ami, et je crois même d’un parent, à M. du Boishardy.

Mlle  de Kergadiou, étant fort belle et très séduisante, ne tarda pas à inspirer à son tuteur une passion qui fut bientôt partagée. Cette affection mutuelle, difficile à cacher longtemps au milieu de la vie errante de M. du Boishardy, souvent accom-