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sion, la passion de la danse. Ce n’est pas là la Terpsichore antique, froide, élégante, correcte, noble, classique. Non, c’est la vraie danse, la danse moderne, non pas la danse des déesses et des sylphides, mais la danse des femmes passionnées du Midi, cette danse palpitante, amoureuse, rhythmée, poétique et matérielle à la fois, qui est à la marche ce que le chant est à la parole, c’est-à-dire qui est une des langues que l’amour arrive à parler.

La Zingara s’enivre tellement de sa danse qu’elle semble même oublier qu’on la regarde. Elle danse pour elle-même et non pour les autres, elle ne veut pas paraître belle, elle est seulement passionnée ; elle n’a jamais eu de coquetterie, mais elle est amoureuse et sa danse le dit ; le mouvement de la figure entière est excellent ; la ligne, sans être d’une pureté irréprochable, est élégante et mélodieuse. La Zingara est pleine de verve, d’énergie, de vigueur ; sans être massive, elle est forte, mais elle a des formes féminines ; l’énergie ne lui vient pas des muscles, mais de l’âme.

Enfin, cette statue a le grand mérite de l’originalité sans bizarrerie. Elle s’illumine d’une pensée, d’une passion, et, tout en ne sortant pas des conditions de l’art, elle a quelque chose de drama-