Page:Kindt - Impressions d une femme au salon de 1859.djvu/54

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les yeux levés vers le ciel, fixés vers cette grande clarté qui illumine la part du ciel d’où vient la voix. Le regard de la sainte fille est plein d’enthousiasme et de foi, l’expression de toute la tête est fort belle, fort passionnée, fort émouvante, mais je trouve à toute cette figure le défaut d’être peinte avec trop de réalité, avec des tons trop crus, avec une certaine brutalité toute contemporaine. Il fallait conserver au tableau la physionomie de légende sacrée qu’a l’histoire de Jeanne d’Arc. C’est ce que le peintre n’a pas fait. Il a peint une belle fille pieuse, dont l’âme s’élève vers Dieu ; je voudrais deviner la vierge-soldat qui va battre Salisbury, Suffolk, Talbot, les vieux compagnons du prince Noir, qui va éclipser la gloire de Dunois, de Lahire, qui va sauver la France perdue.

Il me reste à parler du dernier tableau de Benouville, du tableau émotion. Ce tableau, c’est le portrait inachevé de Mme Benouville et de ses deux enfants. Ce n’est pas un tableau, c’est un poëme. L’artiste heureux peint la femme qu’il aime et les deux beaux enfants qu’elle lui a donnés. Déjà elle est terminée, cette tête souriante et pure de l’heureuse épouse, de l’heureuse mère… Tout à coup, la mort interrompt le doux travail. Un des enfants est enlevé à l’amour de ses parents.