Page:Kindt - Impressions d une femme au salon de 1859.djvu/69

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comprenne et qu’il aime. M. Antigna était réaliste avant M. Courbet. Il a de grandes et belles qualités ; sa couleur, un peu terreuse, a néanmoins de la puissance et de l’harmonie ; il est énergique, passionné ; il exprime bien ce qu’il veut exprimer. L’un de ses tableaux représente une Scène de guerre civile. Dans une mansarde, une pauvre famille est en proie aux plus terribles angoisses. Un homme est étendu sur le lit, son linge est taché de sang, sa pensée, son regard se dirigent vers la porte, l’ennemi va venir peut-être ; un jeune homme déterminé, pistolet au poing, se tapit contre cette porte ; la femme du blessé se tient près du lit, armée d’une hache, résolue à sauver son mari au péril de sa vie ; plus loin une jeune fille s’est évanouie ; enfin, près de celle-ci, à l’angle droit du tableau, une vieille femme épouvantée se jette à genoux devant un crucifix.

Il y a plusieurs tableaux dans cette toile ; la composition manque d’unité, l’intérêt, au lieu de se concentrer sur les personnages principaux, le blessé et sa femme, s’éparpille également sur tous. Les têtes sont bien dessinées et très-justes d’expression. Plus simplement conçu, avec un peu plus de science des sacrifices, ce tableau eût été une des meilleures toiles de M. Antigna.