Page:Kinon - L’Âme des saisons, 1909.djvu/171

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
167
LE VENT ET LES FEUILLES MORTES


Oh ! sois triste ! — Vois-tu, si tu n’avais souffert,
Tu ne connaîtrais point la bonté de cette heure,
Ni d’être appariée à l’automne qui pleure,
Ni de languir dans le feuillage jaune et vert.

Et sois bonne ! — Comment rester dans l’amertume
Devant cet horizon qui bleuit et qui fume ?
Comment garder rancune et ne point pardonner
Devant ce pur soleil que Dieu fait rayonner ?
 
Et comment sans tendresse et sans bonnes paroles
Voir les roses pleurer des larmes de rubis
Et Septembre gagner ces premiers cheveux gris
Que les fils de la Vierge accrochent aux corolles ?

Oh ! tu n’espérais plus un semblable matin,
Tissu de soleil tiède et de frileux satin,
Et tu n’attendais plus cette caresse exquise
Des arbres, du soleil, du ciel et de la brise...

Tu n’aurais point ta part du poème azuré
Sans l’ancienne souffrance et sa mélancolie.
Va, n’envions point ceux que la souffrance oublie
Et plaignons les yeux durs qui n’ont jamais pleuré !...