Page:Kipling - Au hasard de la vie, trad. Varlet, 1928.djvu/184

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à l’improviste de l’infanterie britannique au nombre de trois compagnies, qui s’élancèrent à la tête des attelages de canons, et firent tout arrêter net parmi des jurons et des rires.

— Qu’en dites-vous, l’arbitre ? interrogea le major-général commandant l’attaque.

Et d’une seule voix les canonniers conducteurs et les canonniers d’avant-train répondirent : « Éliminé ! » tandis que le colonel de l’artillerie crachait son dépit.

— Tous vos éclaireurs sont au pouvoir de notre corps principal, dit le major. Vos flancs sont dégarnis sur un espace de trois kilomètres et demi. Je pense que nous avons cassé les reins à cette division. Et tenez ! voilà les Gourkhas !

Une fusillade lointaine partit de l’arrière-garde à près de deux kilomètres de distance, et fut accueillie par des hurlements de joie. Les Gourkhas, qui auraient dû passer au large de la deuxième division, lui avaient marché sur la queue dans l’obscurité, mais se dégageant ils se rabattirent en hâte sur la ligne la plus proche qui nous était presque parallèle, à une dizaine de kilomètres de distance.

Notre colonne ondula et s’avança, sans assurance… trois batteries, la réserve de munition divisionnaire, le bagage, et une section du corps médical et d’ambulanciers. À regret, le commandant promit de se déclarer « coupé » à l’arbitre le plus proche, et envoyant à Eblis sa cavalerie et toute autre cavalerie existante, poussa de l’avant pour reprendre contact avec le reste de la division.