Page:Kipling - Le Livre de la jungle, trad. Fabulet et Humières.djvu/154

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pêche en eau profonde, elle allait droit à leur lieu de récréation et appelait, comme une brebis appelle son agneau, jusqu’à ce qu’elle entendît Kotick bêler. Alors, elle se dirigeait vers lui en stricte ligne droite, cognant de côté et d’autre avec ses nageoires de devant et jetant les jeunes phoques cul par-dessus tête. Il y avait toujours quelques centaines de mères en quête de leurs enfants à travers le terrain des jeux, et les babies avaient grand besoin d’ouvrir l’œil ; mais, comme Matkah disait à Kotick :

— Tant que tu ne te vautres pas dans l’eau bourbeuse pour y prendre la gale, tant que tu ne te mets pas de sable sec dans une coupure ou une éraflure, et tant que tu ne nages pas quand la mer est grosse, aucun mal ne peut t’arriver ici.

Les petits phoques ne savent pas mieux nager que les petits enfants, mais ils ne sont pas heureux jusqu’à ce qu’ils aient appris. La première fois que Kotick descendit à la mer, une vague l’emporta, lui fit perdre pied, sa grosse tête s’enfonça, et ses petites nageoires de derrière se dressèrent en l’air, exactement comme sa mère le lui avait dit dans la chanson ; en effet, si la vague suivante ne l’avait rejeté vers le bord, il se serait noyé. Après cela, il apprit à rester étendu dans une flaque de la grève,