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le second livre de la jungle

l’année de la grande sécheresse… un banc allongé qui a résisté à trois inondations ?

— Il y en avait deux, répondit le Mugger, un en amont, et un autre en aval.

— Ah ! oui, j’avais oublié. Ils étaient séparés par un chenal qui se dessécha plus tard, — dit l’Adjudant, qui se piquait d’avoir de la mémoire.

— C’est sur le banc d’aval que s’échoua le bateau de l’homme qui me voulait du bien. Il dormait à l’avant, et, à moitié éveillé, sauta dans l’eau jusqu’à la ceinture… non, jusqu’aux genoux à peine… pour dégager son bateau. Le bateau, allégé, se mit en marche et alla toucher encore au-dessous du banc voisin, selon le cours de la rivière en ce temps-là. Je suivis, car je savais qu’il viendrait des hommes pour le tirer sur la berge.

— Et en vint-il ? dit le Chacal avec un frisson d’émotion.

La chasse sur une telle échelle, cela l’impressionnait.

— Il en vint là et plus bas en aval aussi. Je n’allai pas plus loin, mais cela m’en fit trois en un seul jour… tous manjis (bateliers) bien nourris, et, sauf en ce qui concerne le dernier — là, ce fut ma faute —, pas un cri pour donner l’éveil à ceux de la berge.