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les croque-morts

Le Mugger ouvrit l’œil gauche, et regarda fixement l’Adjudant.

— C’est vrai, insista le gros oiseau. Un menteur ne ment que lorsqu’il espère être cru. Quand on n’a pas vu ces bateaux, on ne peut pas croire à la vérité de ce que je dis.

— Voilà qui est plus raisonnable, dit le Mugger. Et alors ?

— De l’intérieur de ce bateau, ils retiraient de gros morceaux d’une matière blanche qui, en peu de temps, se changeait en eau. Beaucoup de cette matière se brisait en miettes, et se répandait sur le bord ; quant au reste, ils le mettaient promptement dans une maison entourée de murs épais. Mais un batelier, tout en riant, en prit un morceau pas plus gros qu’un petit chien, et me le jeta. J’ai l’habitude — comme tous les mes pareils — d’avaler sans réfléchir, et j’avalai ce morceau selon notre coutume. Immédiatement j’éprouvai un froid excessif, qui, prenant ma poche pour point de départ, descendit jusqu’à l’extrémité de mes pattes, et me priva même de la parole, tandis que les bateliers se moquaient de moi. Je n’ai jamais ressenti un tel froid. Je dansai de nouveau en criant contre la fausseté de ce monde. Les bateliers rirent de