Page:Kipling - Trois Troupiers et autres histoires, trad. Varlet, 1926.djvu/42

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Et sans broncher elle saute dedans parmi son propre fourniment.

« Je démarrai et la conduisis à toute vapeur jusque chez le colonel avant le retour dudit colonel ; elle poussa des cris à me faire croire qu’elle allait s’évanouir. Arrive l’ayah, disant toutes sortes de choses comme quoi le capitaine était venu pour chercher le fourniment et qu’il était parti à la gare.

« — Enlève le bagage, espèce de diablesse, ou je t’assassine !

« Les lanternes des carrioles ramenant les gens de la représentation apparaissaient au bout de l’esplanade, et je ne vous dis que ça, la manière dont les deux femmes travaillaient aux paquets et aux malles était un phénomène. Je mourais d’envie de les aider, mais vu que je ne voulais pas être reconnu, je restai enveloppé de ma couverture, à tousser, et remerciai les saints qu’il n’y avait pas de lune cette nuit-là.

« Quand on eut reporté le tout dans la maison, je filai sans demander de bakchich[1], éteignis mes lanternes et menai un train d’enfer dans la direction opposée à celle des autres voitures. Tout à coup je vois un homme, un noir, vautré sur la route. Je saute à bas avant d’arriver à lui, car je soupçonnais

  1. Pourboire.