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LE JUGEMENT DE DIEU.

de son pied, et, salissant son sabre, il lui ordonna, en appelant les chiens et les valets, de quitter à l’instant l’appartement et le château.

Littegarde, pâle et froide comme du marbre, se releva en demandant le temps nécessaire aux préparatifs de son départ ; mais son frère, hors de lui, et repoussant d’un coup de sabre sa femme qui se jetait à ses pieds pour implorer sa clémence, répéta : « Hors du château à l’instant ! » Alors la malheureuse Littegarde, plus morte que vive, quitta la chambre, et descendit dans la cour, où son frère lui fit porter un paquet de linge avec quelque argent, puis il ferma sur elle la porte du château en l’accablant de ses malédictions.

Ce passage subit du faîte d’un bonheur presque sans nuages dans l’abîme d’une misère infinie et sans ressources,