Page:Kostomarov - Deux nationalités russes.djvu/21

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ciers ; on voit apparaître le désir de remplacer par le droit les impulsions personnelles, tout en gardant l’antique liberté ; la volonté d’y ajouter une organisation légale en diminuant l’arbitraire individuel. Le peuple, qui jusqu’alors se mouvait dans un gouffre d’arbitraire universel, tantôt asservi par les plus forts, tantôt à son tour renversant ces puissants pour en élever d’autres, est à présent soumis et se laisse asservir régulièrement, c’est-à-dire qu’il reconnaît en quelque sorte la légalité de cet asservissement.

Mais les éléments de l’antique Rouss, développés jusqu’à un certain point déjà au XIIe siècle et qui étaient restés cachés longtemps parmi le peuple, apparaît comme un brillant météore sous la forme du Kozatchestvo. Mais ce Kozatchestvo, en tant qu’il était une renaissance des antiques usages, portait en soi des ferments de décomposition. Il s’adresse aux idées qui n’avaient plus d’aliments dans l’histoire contemporaine. Le Kozatchestvo des XVIe et XVIIe siècles et le fractionnement des XIIe et XIIIe siècles étaient beaucoup plus rapprochés qu’on ne se le figure. Si les traits de ressemblance extérieure sont faibles en comparaison de la différence, la ressemblance intime est réelle. Le Kozatchestvo était d’origine variée, comme les Droujines de l’ancienne Kief, on y trouve aussi des éléments turcs, il y règne aussi l’anarchie personnelle, la même tendance vers un but quelconque, laquelle se paralyse et se détruit elle-même, le même défaut d’exactitude, de clarté, de persévérance, la même habitude d’élever des chefs et de les renverser, et les mêmes querelles en leur nom. Peut-être on pourra juger important le fait qu’anciennement on faisait attention à la descendance des chefs, il y avait comme un droit de famille, tandis que dans le Kozatchestvo les chefs étaient choisis au hasard. Mais bientôt les Cosaques tendirent au même fractionnement et certainement y seraient arrivés sans les événements imprévus qui l’empêchèrent. Lorsque Khmelnitzki eut mérité gloire et honneur dans la fraternité cosaque, celle-ci élut son fils qui ne méritait cet honneur par aucune qualité spéciale. Les hetmans furent souvent élus parce qu’ils descendaient de Khmelnitzki, et c’est seulement l’extinction de cette famille qui empêcha le rétablissement des apanages de princes et du fractionnement.