Page:Krafft-Ebing - Psychopathia Sexualis, Carré, 1895.djvu/285

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184 livres. Urine sans albumine, sans sucre, mais contient de l’acide urique d’une façon anormale ; elle est très claire, presque comme de l’eau, toutes les fois que j’ai eu une grande émotion. Les selles sont régulières, mais, quand elles ne le sont pas, j’éprouve tous les malaises de la constipation de la femme. Je dors mal, souvent pendant des semaines entières ; mon sommeil ne dure que deux ou trois heures. L’appétit est assez bon, mais mon estomac ne supporte pas plus que celui d’une forte femme, et réagit contre les plats pimentés par un exanthème de la peau et des sensations de brûlure dans le canal uréthral. La peau est blanche, très lisse ; la démangeaison insupportable qui m’a tourmenté depuis deux ans, s’est atténuée ces semaines dernières et ne se manifeste plus qu’à la jointure des genoux et au scrotum.

Disposition aux sueurs ; autrefois presque pas de transpirations ; maintenant j’ai toutes les nuances des mauvaises transpirations féminines, surtout dans le bas du corps, de sorte que je suis obligé de me tenir encore plus propre qu’une femme. Je mets des parfums dans mon mouchoir, je me sers de savons parfumés et d’eau de Cologne.

État général. – Je me sens comme une femme ayant la forme d’un homme ; bien que je sente encore une conformation d’homme en moi, le membre viril me paraît une chose féminine ; ainsi, par exemple, le pénis me paraît un clitoris, l’urèthre un vagin et l’entrée vaginale ; en le touchant, je sens toujours quelque chose de moite, quand même il serait aussi sec que possible ; le scrotum me paraît des grandes lèvres, en un mot je sens toujours une vulve et seul celui qui a éprouvé cette sensation, saurait dire ce qu’elle est. La peau de tout mon corps me semble féminine ; elle perçoit toutes les impressions, soit les attouchements, soit la chaleur, soit les effets contraires, comme une femme, et j’ai les sensations d’une femme ; je ne peux pas sortir les mains dégantées, car la chaleur et le froid me font également mal ; quand la saison où il est permis même aux messieurs de porter des ombrelles est passée, je suis en grande peine à l’idée que la peau de ma figure pourrait souffrir jusqu’à la prochaine saison. Le matin, en me réveillant, il se produit pendant quelques minutes un crépuscule dans mon esprit, comme si je me cherchais moi-même ; alors se réveille l’idée obsédante d’être femme ; je sens l’existence d’une vulve et salue le jour par un soupir plus ou moins fort, car j’ai peur déjà d’être obligé de jouer