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à la campagne, il n’avait que rarement l’occasion de satisfaire ses besoins ; il y suppléait par la masturbation. Il lui fallait se masturber une ou deux fois par jour.

Depuis deux mois, il n’avait pas coïté. Son excitation sexuelle s’est de plus en plus exaltée ; il ne pensait qu’au moyen de satisfaire son instinct. La masturbation ne suffisait plus pour faire cesser les tourments de plus en plus pénibles dus à la continence. Ces jours derniers, il eut un désir violent de coïter ; insomnie de plus en plus aiguë et irritabilité. Il ne se souvient que sommairement de la période de sa maladie. Le malade était guéri au mois de décembre. C’est un homme très convenable. Il considère son instinct irrésistible comme un cas pathologique et redoute l’avenir.


OBSERVATION 15. – Le 11 juillet 1884, R…, trente-trois ans, employé, atteint de paranoia persecutoria[ws 1] et neurasthenia sexualis[ws 2], a été reçu à la clinique. Sa mère était névropathe. Son père est mort d’une maladie de la moelle épinière. Dès son enfance, il eut un instinct sexuel très puissant dont il prit pleine conscience à l’âge de six ans. Depuis cette époque, masturbation ; à partir de quinze ans, pédérastie, faute de mieux ; quelquefois tendances à la sodomie. Plus tard, abus du coït dans le mariage, cum uxore[ws 3]. De temps à autre même des impulsions perverses, idée de faire le cunnilingus, de donner des cantharides à sa femme, dont le libido ne correspond pas au sien. Peu de temps après le mariage, la femme mourut. La situation économique du malade devient de plus en plus mauvaise ; il n’a plus les moyens de se procurer des femmes. Il revient à l’habitude de la masturbation, se sert de lingua canis[ws 4] pour provoquer l’éjaculation. De temps en temps accès de priapisme et état frisant le satyriasis. Il était alors forcé de se masturber pour éviter le stuprum[ws 5]. À mesure que la neurasthénie sexuelle a augmenté, s’accompagnant de velléités de mélancolie, il y a diminution du libido nimia[ws 6], ce qu’il a considéré comme un soulagement salutaire.


Un exemple classique d’hyperesthésie sexuelle pure est le cas suivant que j’emprunte à la Folie lucide de Trélat et qui est très précieux pour l’étude de certaines Messalines, devenues célèbres dans l’histoire.


OBSERVATION 16. – Mme V… souffre depuis sa première jeunesse d’andromanie. De bonne famille, d’un esprit cultivé, bonne

  1. délire de persécution
  2. impuissance
  3. avec son épouse
  4. langue de chien : drogue composée de diverses plantes, ayant un effet aphrodisiaque
  5. engourdissement
  6. désir excessif