Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/266

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ces sociétés secrètes n’ont cessé de travailler avec un dévouement sans bornes, une persévérance et un courage héroïques. Si la République est sortie tout naturellement de l’insurrection de février 1848, c’est grâce à ces sociétés, c’est grâce à la propagande par le fait qu’elles firent pendant trente ans. Sans leurs nobles efforts, jusqu’à présent encore la République eût été impossible.




Leur but était donc de s’emparer eux-mêmes du pouvoir, de s’installer en dictature républicaine. Mais, comme de raison, jamais ils n’y sont parvenus. Comme toujours, de par la force inévitable des choses, ce n’est pas une conspiration qui renversa la royauté. Les conspirateurs avaient préparé la déchéance. Ils avaient largement semé l’idée républicaine ; leurs martyrs en avaient fait l’idéal du peuple. Mais, la dernière poussée, celle qui renversa définitivement le roi de la bourgeoisie, fut bien plus vaste et plus forte que celle qui pouvait venir d’une société secrète ; elle vint de la masse populaire.

Le résultat est connu. Le parti qui avait préparé la chute de la royauté se trouva écarté des marches de l’Hôtel-de-Ville. D’autres, trop prudents pour courir les chances de la conspiration, mais plus connus, plus modérés aussi, guettant le moment de s’emparer du pouvoir, prirent la place que les conspirateurs pensaient conquérir au bruit de la canonnade. Des publicistes, des avocats, de beaux parleurs qui travaillaient à se faire un nom pendant que les vrais républicains forgeaient les armes ou expiraient au bagne, s’empa-