Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/281

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dosser l’étiquette socialiste ils ne parviendraient jamais à escalader les marches du pouvoir. Il leur fallait donc trouver un moyen de se faire accepter par le parti, sans en adopter les principes. D’autre part, ceux qui ont compris que le moyen le plus facile de maîtriser le socialisme, c’est d’entrer dans ses rangs, de corrompre ses principes, de faire dévier son action, faisaient une poussée dans le même sens.

Malheureusement il s’est trouvé des socialistes, des socialistes d’autrefois, désireux de grouper autour d’eux le plus de monde possible, pourvu que les nouveaux venus acceptent l’étiquette de socialistes, qui se sont empressés d’ouvrir largement les portes et de faciliter l’entrée aux soi-disant convertis. Ils ont renoncé eux-mêmes à l’idée-mère du socialisme, et, sous leurs auspices, il se constitue aujourd’hui une nouvelle espèce de soi-disant socialistes n’ayant conservé de l’ancien parti que le nom.

Semblables à ce colonel de gendarmerie russe qui disait à un de nos amis que, lui aussi, il trouvait l’idéal communiste admirable, mais que cet idéal ne pouvant être réalisé avant 200 peut-être 500 ans, il fallait en attendant mettre notre ami sous les verrous, pour le punir de la propagande communiste qu’il avait faite ; semblables, dis-je, à ce colonel de gendarmerie, ils déclarent que l’abolition de la propriété individuelle et l’expropriation doivent être renvoyées à un avenir lointain ; que tout cela, c’est du roman, de l’utopie ; qu’il faut s’occuper, en attendant, de réformes réalisables, et que ceux qui tiennent à l’idée d’expropriation sont leurs pires ennemis. — « Préparons, disent-ils, le terrain, non pas pour exproprier le sol, mais pour nous emparer de la machine gouverne-