Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/304

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La chanson, — celle qui est trop franche pour être imprimée, mais qui fait le tour de la France en se transmettant de mémoire, — a toujours été un des moyens de propagande des plus efficaces. Elle tombait sur les autorités établies, elle bafouait les têtes couronnées, elle semait jusqu’au foyer de la famille le mépris de la royauté, la haine contre le clergé et l’aristocratie, l’espérance de voir bientôt venir le jour de la révolution.

Mais c’est surtout au placard que les agitateurs avaient recours. Le placard fait plus parler de lui, il fait plus d’agitation qu’un pamphlet ou une brochure. Aussi les placards, imprimés ou écrits à la main, paraissent chaque fois qu’il se produit un fait qui intéresse la masse du public. Arrachés aujourd’hui, ils reparaissent demain, faisant enrager les gouvernants et leurs sbires. « Nous avons manqué votre aïeul, nous ne vous manqueront pas ! » lit aujourd’hui le roi sur une feuille collée aux murs de son palais. Demain, c’est la reine qui pleure de rage en lisant comment on affiche sur les murs les détails de sa vie honteuse. C’est alors que se préparait déjà cette haine, vouée plus tard par le peuple à la femme qui aurait froidement exterminé Paris, pour rester reine et autocrate.

Les courtisans se proposent-ils de fêter la naissance du dauphin, les placards menacent de mettre le feu aux quatre coins de la ville, et ils sèment ainsi la panique, en préparant les esprits à quelque chose d’extraordinaire. Ou bien, ils annoncent qu’au jour des réjouissances, « le roi et la reine seront conduits sous bonne escorte en Place de Grève, puis iront à l’Hôtel-de-Ville confesser leurs crimes, et monteront sur un écha-