Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/34

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d’hui, nous voyons que ce mode de groupement a accompli dans l’histoire tout ce dont il fut capable et s’effondre aujourd’hui sous le poids de ses propres attributions, pour céder la place à de nouvelles organisations basées sur de nouveaux principes, plus en rapport avec les tendances modernes de l’humanité.

D’autre part, ceux qui observent avec attention le mouvement des idées dans le sein de la société actuelle savent bien avec quelle ardeur la pensée humaine travaille aujourd’hui à la revision complète des appréciations qui nous furent léguées par les siècles passés et à l’élaboration de nouveaux systèmes philosophiques et scientifiques destinés à devenir la base des sociétés à venir. Ce n’est plus seulement le sombre réformateur qui, exténué par un travail au-dessus de ses forces et par une misère au-dessus de sa patience, critique les institutions honteuses dont il subit le poids et qui rêve un avenir meilleur. C’est aussi le savant qui, quoique élevé dans les anciens préjugés, apprend cependant peu à peu à les secouer et, prêtant l’oreille aux courants d’idées dont les esprits populaires se pénètrent, s’en fait un jour le porte-voix, l’énonciateur. « La hache de la critique sape à grands coups tout l’héritage qu’on nous avait transmis à titre de vérités ; philosophie, sciences naturelles, morale, histoire, art, rien n’est épargné dans ce travail de démolition ! » — s’écrient les conservateurs. Rien, jusqu’aux bases mêmes de vos institutions sociales, — la propriété et le pouvoir — attaqués aussi bien par le nègre de l’usine que par le travailleur de la pensée, par l’intéressé au changement que par celui qui reculerait avec effroi le jour où il verrait ses idées revêtir un corps, secouer la