Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/39

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Le bon sens de l’humanité a déjà répondu à ces questions, et voilà sa réponse :

La prochaine révolution aura un caractère de généralité qui la distinguera des précédentes. Ce ne sera plus un pays qui se lancera dans la tourmente, ce seront les pays de l’Europe. Si, autrefois, une révolution localisée était possible, aujourd’hui, avec les liens de solidarité qui se sont établis en Europe, étant donné l’équilibre instable de tous les États, une révolution locale est devenue une impossibilité, si elle dure un certain temps. Comme en 1848, une secousse se produisant en un pays gagnera nécessairement les autres, et le feu révolutionnaire embrasera l’Europe entière.

Mais si en 1848, les villes insurgées purent encore mettre leur confiance dans des changements de gouvernement ou dans des réformes constitutionnelles, ce n’est plus le cas aujourd’hui. L’ouvrier parisien n’attendra pas d’un gouvernement, — fût-il même celui de la Commune libre, — l’accomplissement de ses vœux : il se mettra à l’œuvre lui-même, en se disant : « Ce sera autant de fait ! »

Le peuple russe n’attendra pas qu’une Constituante vienne le doter de la possession du sol qu’il cultive : pour peu qu’il espère réussir, il cherchera lui-même à s’en emparer ; il le cherche déjà : témoin, les émeutes continuelles. De même en Italie, en Espagne ; et si l’ouvrier allemand se laisse berner un certain temps par ceux qui aimeraient que tout se fasse par télégrammes de Berlin, l’exemple de ses voisins et l’incapacité de ses meneurs ne tarderont pas à lui enseigner la vraie voie révolutionnaire. Le caractère distinctif de la révolution prochaine sera donc celui-