Page:Kropotkine - L'Action anarchiste dans la révolution, 1914.djvu/7

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ces conceptions, soit dans la vie des paysans français, soit ailleurs, ils les brisent plutôt que d’en reconnaître la raison. C’est ainsi que les jacobins ont continué l’œuvre de destruction des institutions populaires de la France, commencée par Turgot. Il abolissait les assemblées primaires de village, le mir qui vivait encore de son temps, le trouvant trop tumultueux, et insuffisamment ordonné. Les jacobins continuaient son œuvre : ils abolissaient les communautés de famille, qui avaient échappé à la hache du droit romain ; ils donnaient le coup de grâce à la possession communale du sol ; ils faisaient les lois draconiennes contre les Vendéens par milliers que de se donner la peine de comprendre leurs institutions populaires. Et les jacobins modernes, en rencontrant la commune et la fédération des tribus parmi les Kabyles, préfèrent massacrer ces institutions par leurs tribunaux, que de déroger à leurs conceptions de propriété et d’hiérarchie romaines. Les bourgeois anglais en ont fait de même dans les Indes.

Ainsi, du jour où la Grande Révolution du siècle passé embrassa à son tour les doctrines romaines de l’État omnipotent, sentimentalisées par Rousseau et représentées par lui avec une étiquette d’Égalité et de Fraternité romano-catholiques, du jour où elle prit pour base de l’organisation sociale, la propriété et le gouvernement électif, — c’est aux petits-fils des « légistes » du XVIIe siècle, aux bourgeois qu’incomba la tâche d’organiser et de gouverner la France selon ces principes. Le peuple n’avait plus rien à y faire, sa force créatrice étant dans une toute autre direction.

II

Si par malheur, lors de la prochaine révolution, le peuple, encore une fois, ne comprend pas que sa mission est historique est de briser l’État, créé par les code de Justinien et les édits du pape ; s’il se laisse encore une fois éblouir, par les conceptions romaines « légales »,