Page:Kropotkine - L’Anarchie, sa philosophie, son idéal.djvu/10

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faire place à cette harmonie que Charles Fourier avait entrevue un jour et qui n’est que la résultante des essaims innombrables de matière, marchant chacun devant soi, et se tenant mutuellement en équilibre.




Si ce n’était d’ailleurs que l’astronomie qui subît ce changement ! Mais non : la même modification se produit dans la philosophie de toutes les sciences sans exception ; celles qui traitent de la nature, comme celles qui traitent des rapports humains.

Dans les sciences physiques, les entités : chaleur, magnétisme, électricité, disparaissent. Quand un physicien parle aujourd’hui d’un corps échauffé ou électrisé, il ne voit plus une masse inanimée, à laquelle viendrait s’ajouter une force inconnue. Il s’efforce de reconnaître dans ce corps, et dans l’espace qui l’entoure, la marche, les vibrations des atomes infiniment petits qui se dirigent dans tous les sens, vibrent, se meuvent, vivent, et par leurs vibrations, leurs chocs, leur vie, produisent les phénomènes de chaleur, de lumière, de magnétisme ou d’électricité.

Dans les sciences qui traitent de la vie organique, la notion de l’espèce et de ses variations s’efface et la notion de l’individu s’y substitue. Le botaniste et le zoologiste étudient l’individu — sa vie, son adaptation au milieu. Des changements qui se produisent en lui, sous l’action de la sécheresse ou de l’humidité, de la chaleur ou du froid, de l’abondance ou de la pauvreté de la nourriture, de sa plus ou moins sensibilité aux actions du milieu extérieur, naîtront les espèces ; et les variations de l’espèce ne sont plus pour le biologiste que des résultantes — des sommes de varia-