Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/206

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pain et le sel de n’y plus penser en mauvaise part. Si quelqu’un cependant se considère comme lésé, il doit en appeler au Vogt de terre et lui demander justice avant le coucher du soleil. » Lors du débarquement le fonds des amendes du fred était remis au Vogt du port pour être distribué parmi les pauvres[1].

Ce simple récit dépeint sans doute mieux que n’importe quelle description l’esprit des guildes du moyen âge. De semblables organisations se formaient partout où un groupe d’hommes — pêcheurs, chasseurs, marchands voyageurs, ouvriers en bâtiment ou artisans établis — se réunissaient dans un but commun. Ainsi il y avait à bord d’un navire l’autorité navale du capitaine ; mais, pour le succès même de l’entreprise commune, tous les hommes à bord, riches et pauvres, maîtres et hommes de l’équipage, capitaine et matelots, acceptaient d’être égaux dans leurs relations mutuelles, d’être simplement des hommes s’engageaient à s’aider les uns les autres et à régler leurs différends possibles devant des juges élus par tous. De même aussi lorsqu’un certain nombre d’artisans — maçons, charpentiers, tailleurs de pierre, etc. — se réunissaient pour une construction, par exemple pour bâtir une cathédrale, ils appartenaient tous à une cité qui avait son organisation politique, et chacun d’eux appartenait de plus à son propre métier ; mais ils étaient unis en outre par leur entreprise commune, qu’ils connaissaient mieux que personne, et ils s’organisaient en un corps, s’unissant par des liens étroits, quoique temporaires ; ils fondaient la guilde pour l’érection de la cathédrale[2]. Nous pouvons voir les mêmes

  1. J. D. Wunderer, « Reisebericlit » dans Fichard, Frankfurter Archiv, II, 245 ; cité par Jansen, Geschichte des deutschen Volkes, I, 355.
  2. D. Leonard Ennen, Der Dom zu Köln, Historische Einleitung, Cologne, 1871, pp. 46-50